Analyse de l’impact social de la ZFE de l’agglomération grenobloise

Synthèse

En l’absence de mise en place d’une augmentation très importante de capacités de transports collectifs, pour une très grande partie des personnes concernées, la mise en place de la ZFE va se traduire par l’obligation de remplacer leur véhicule.

Au 1er janvier 2022, les véhicules classés Crit’Air 3, 4, 5 et non-classés représentent 52300 véhicules sur un total de 161280 véhicules, soit 32 % des véhicules de la ZFE. Ce total était de 36 % en 2021, 40 % en 2020, avec la moitié de la diminution (2 % par an) pour les Crit’Air 4 et 5, et la moitié pour les Crit’Air 3.

A ce rythme, on peut prévoir que l’évolution (sans la ZFE) aurait donné au 1er janvier 2023 28 %,  au  1er janvier 2024 24 %, au 1er janvier 2025.

Donc à l’horizon 2025, la ZFE va mettre à l’écart 25 % des véhicules de la zone concernée.

Concrètement, même en tenant compte de l’évolution prévisible, au 1er janvier 2024, 5000 véhicules supplémentaires seront interdits de circuler (Crit’Air 4 et 5), et au 1er janvier 2025 28 000 véhicules supplémentaires devront être écartés.

Cela veut dire qu’au premier janvier 2024, on impose un coût de 50 Millions d’€, et au
premier janvier 2025 un coût supplémentaire de 280 millions d’€.
Ce chiffre est à comparer aux 26 millions dégagés par Grenoble Alpes Métropole sur 3 ans.

Mais cela ne représente que les chiffres des véhicules des habitants de la ZFE. Si on retient un ratio de 25 % (aujourd’hui 31%), au niveau de Grenoble Alpes Métropoles, c’est 60 000 véhicules qui seront concernés au 1er janvier 2025, et si on regarde les communes à moins de 20 km, 80 000 véhicules supplémentaires sont potentiellement concernés.

Si on prend en compte les 3 zones (ZFE, GAM, GAM+20 km), le nombre de véhicules concernés
est :

  • au 1er janvier 2024, 5 000 véhicules (habitants de la ZFE) , 20 000 véhicules (Grenoble Alpes
    Métropoles) et 50 000 véhicules (GAM + distance 20 km),
  • au 1er janvier 2025, 28 000 véhicules (habitants de la ZFE) , 70 000 véhicules (Grenoble Alpes Métropoles) ou 130 000 véhicules (GAM + distance 20 km).

C’est à dire un coût au 1er janvier 2024 qui est entre 50 Millions d’€ et 500 M€, et au 1er janvier
2025, un coût additionnel compris entre 280 Millions d’€ et 1.3 Milliard d’€.

Bien sûr, tous les véhicules de la Métropole ne rentreront pas dans la ZFE, ni ceux à 20 km, mais on peut légitiment penser qu’une partie majoritaire des véhicules de Grenoble Alpes Métropoles auront à entrer dans la ZFE, et un partie non négligeable des personnes habitant à 20 km. Même s’il n’y a que 30 % des 200 000 véhicules concernés, cela représente 60 000 véhicules, soit un coût moyen de 600 millions d’€ !

Il faut rapporter ces chiffres aux 22 parking relai (2 300 places), et aux 15 000 voyageurs quotidiens du TER Grenoble Lyon aujourd’hui bondé. Cela montre le chemin qu’il reste à accomplir pour qu’il y ait une alternative sérieuse à la voiture.

Les graphiques page 19 et 20 montrent le lien clair qu’il y a entre la possession de véhicules
Crit’Air 3, 4 et 5 et le niveau de pauvreté de la commune. Il y a aussi un lien entre le taux de
possession de véhicules par habitant et le niveau de pauvreté de la commune.

Le texte publié sur le blog de Mathieu Chassignet « Pour une mobilité durable et solidaire » ,
intitulé « Enquête nationale sur la mobilité des français : quelques enseignements de la nouvelle édition et évolutions récentes « (page 21) est très riche d’informations.

Par exemple :

Concernant l’utilisation des voitures, on remarque que plus un ménage est riche et plus il
utilise intensément la ou les voitures dont il dispose. Les ménages du 10
e décile parcourent en moyenne 17 000 km par an avec leur(s) voiture(s) alors que ceux du 1er décile parcourent 6 700 km. Si bien que la distance totale parcourue en voiture est 2 fois et demi supérieure pour les 10 % des ménages les plus riches que pour les 10 % les plus pauvres (17 000 km par an contre 6 700 km).

Ou encore

Un autre enseignement est que plus on est riche et plus on se déplace loin. Les ménages les plus riches parcourent en moyenne 10 km par trajet (tous modes de déplacement confondus), alors que les ménages appartenant aux 10 % les plus pauvres parcourent
seulement 5,4 km par déplacement. Ces inégalités ont eu tendance à se renforcer entre 2008 et 2019.

L’étude AramisAuto et OpinionWay(page 33) donne un aperçu significatif des questions sociales
posées par la ZFE.

Les chiffres de France Mobilité (page 36) montrent par ailleurs que les milieux les plus modestes se déplacent moins que les autres et pratiquent plus le covoiturage.

En résumé,

les milieux populaires sont plus pénalisés alors qu’ils polluent moins et qu’ils auront plus de difficultés à financer le remplacement de leur véhicule ;

en l’absence d’ investissement significatif pour augmenter massivement l’offre de
transports en commun, il n’y a pas non plus de solution alternative de qualité ;

 on va imposer un achat d’autant plus coûteux que les niveaux de prix tant de
l’occasion que du neuf sont très élevés, en raison de difficultés d’approvisionnement et de la pénurie relative que va créer la ZFE ;

cet effort sera supporté pour une part importante par les milieux populaires, effort que les aides accordées se sont pas en mesure d’atténuer de façon significatif ;

Bien qu’utilisant moins fréquemment leur voiture et pour des trajets nettement moins longs, les ménages les moins riches risquent donc d’être également les plus pénalisés par les futures ZFE. Un effet surprenant de la ZFE est que la fluidité obtenue par la mise à l’écart des pauvres permettra aux plus riches de mieux se déplacer.

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