À :
- M. Christophe Ferrari, président de Grenoble Alpes Métropole
- M. Sylvain Laval, président du SMMAG
- M. Le préfet de l’Isère
Objet : gratuité et développement des transports publics, réponse à la crise sociale, sanitaire et environnementale
Messieurs,
La direction du SMMAG a décidé de réduire l’offre de transport du réseau de transports publics de l’agglomération grenobloise, en conséquence de la perte de recettes conjoncturelle due à la crise COVID. Et ce, non seulement durant la période de couvre-feu, mais aussi sur l’ensemble de l’année 2021. Selon la note qui a été rendue publique, une diminution de la masse salariale est envisagée.
Cela aurait pour le moins demandé un large débat public. Quel sens cela a-t-il que la Métropole lance sa propre convention citoyenne pour le climat si de telles décisions peuvent être prises sans être débattues ? Alors que la France vient d’être condamnée par le Tribunal Administratif de Paris pour inaction climatique, comment comprendre que le SMMAG réduise l’offre de transports publics ?
Nous ne nions pas les difficultés financières de la SEMITAG. Mais il est nécessaire de prendre la pleine mesure de la situation de crise où nous sommes. Il faut sortir d’une vision à court terme et purement gestionnaire des transports publics. Dans l’immédiat, la dégradation de l’offre rend encore plus difficile le respect de la distanciation sanitaire dans les transports publics. A terme, elle peut conduire à une diminution forte de la fréquentation.
Dans le communiqué de la Métropole sur la mise en place de la convention citoyenne pour le climat, Pierre Verri, vice-président de la Métropole chargé du climat, affirme que pour répondre à l’urgence climatique, «il faut aller plus vite et plus loin. Il est temps d’accélérer et d’emmener avec nous l’ensemble des citoyens ». Nos contradicteurs nous disent souvent que ce qui attire les usagers, ce ne sont pas tant les bas tarifs que le développement et la qualité de l’offre. Là on nous propose une réduction de 15 % de l’offre, et des tarifs inchangés. Est-ce cela, « aller plus vite et plus loin » ?
Nous demandons aux collectivités locales (Métropole et Département) de fournir à la SEMITAG les moyens financiers de mener son activité malgré la crise sanitaire.
L’État doit compenser des pertes de recettes liées à la crise COVID. La mission sénatoriale sur les conséquences de la crise sanitaire a estimé pour 2020 à 2.8 Milliards d’€ les pertes subies par les Autorités Organisatrices des Mobilités. Ce montant est à comparer aux 100 Milliards d’€ du plan de relance.
Assurer la pérennité de la SEMITAG est très important, mais cela ne suffit pas.
Il est très important pour notre avenir que les objectifs de la COP21 soient tenus. Or le secteur des transports représente 30 % du total des émissions de gaz à effet de serre, seul secteur qui soit en augmentation depuis 1990. La pollution atmosphérique est responsable de 48 000 décès prématurés en France.
Développer l’offre de transports publics et instaurer leur gratuité auraient pour résultat une augmentation importante de la fréquentation. C’est ce qui ressort de l’expérience des agglomérations qui ont mis en œuvre la gratuité des transports publics (+85 % à Dunkerque, +70 % à Calais). Ce serait très bénéfique pour l’environnement.
Le pays connaît une crise sociale majeure, dont il faut prendre la mesure. Le nombre de pauvres et de précaires a beaucoup augmenté. En 2020, un million de personnes sont passées sous le seuil de pauvreté, portant le nombre à presque 10 millions, et en 2021 on peut craindre que ce nombre atteigne les 12 millions. En ce début d’année 2021, selon les banques alimentaires, 2,1 millions de personnes bénéficient de l’aide alimentaire, dont la moitié sont des nouveaux bénéficiaires.
La gratuité des réseaux du SMMAG permettrait d’instaurer un vrai droit à la mobilité pour tou.tes. Ce serait un effort de solidarité pour que personne ne soit laissé de côté, pour une autre manière de vivre et partager la ville.
En France la gratuité et le développement des transports publics coûteraient de l’ordre de 10 Milliards d’€ par an. C’est peu de chose par rapport à l’augmentation des fortunes françaises ou du versement des dividendes. Les dividendes versés par les entreprises du CAC40 en 2020 représentent 40 Milliards d’€. Selon le rapport de Oxfam, Bernard Arnault, PDG de LVMH a vu sa fortune s’accroître de 76 milliards de dollars en 2020. Comment accepter qu’une entreprise comme Sanofi reçoive 150 Millions d’€ par an d’aide à la recherche via le Crédit Impôt Recherche, alors que ce groupe a versé 4 Milliards d’€ de dividendes en pleine crise et qu’il a supprimé 40 % de ses emplois de chercheur en 10 ans ?
Dans ce contexte, il nous semble économiquement possible et socialement juste de demander une taxation supplémentaire des entreprises. Porter à 3% le taux du Versement Mobilité amènerait 50 M€ de recettes supplémentaires au budget de la SEMITAG. Nous demandons à la Métropole grenobloise de porter auprès de l’État la demande d’une augmentation significative du Versement Mobilité.
Nous sommes convaincus que le développement et la gratuité des transports du quotidien sont nécessaires pour aller vers un futur vivable et désirable. Nous sommes aussi convaincus que c’est réaliste économiquement parlant.
Malgré la crise, la Métropole de Montpellier a maintenu la gratuité des transports publics le week-end avec l’objectif d’une gratuité totale à mi-mandat, pour protéger l’environnement en incitant aux changements de comportement sans pénaliser les plus fragiles.
Ce que Montpellier a fait la Métropole grenobloise peut le faire.Nous demandons que la gratuité des transports publics le week-end soit mis en œuvre au plus tôt, comme l’avait envisagé le SMMAG en début 2020, avec l’objectif d’une gratuité totale.
Nous sommes bien entendu disponibles pour tout échange qui vous semblerait utile.
Veuillez croire, Messieurs, en notre mobilisation pour le développement et la gratuité des transports publics
Collectif pour la gratuité des transports publics
(CGT, FSU, Solidaires, ATTAC, Ensemble! Isère, Generation.s, La France Insoumise, NPA, PCF)